Syrie : après les frappes, Paris, Londres et Washington entendent relancer la diplomatie

Les trois puissances occidentales ont remis à leurs partenaires du Conseil de sécurité des Nations unies un nouveau projet de résolution sur la Syrie.

Après l’opération militaire qui a visé trois sites liés au programme d’armement chimique syrien, la France, les Etats-Unis et le Royaume-Uni entendent relancer la diplomatie. Ils ont remis à leurs douze partenaires du Conseil de sécurité des Nations unies, samedi 15 avril, un projet de résolution sur la Syrie en trois volets qui devrait être discuté à partir de lundi, selon des diplomates.

Le texte, rédigé par Paris, comprend plusieurs facettes – chimique, humanitaire et politique –, incluant la création d’un nouveau mécanisme d’enquête sur l’emploi d’armes chimiques, selon le texte obtenu par l’Agence France-Presse (AFP).

Dans le domaine chimique, le texte « condamne dans les termes les plus forts tout recours aux armes chimiques en Syrie, en particulier l’attaque du 7 avril à Douma ». Il prévoit de créer « un mécanisme indépendant » d’enquête et d’attribution des responsabilités « basé sur des principes d’impartialité et de professionnalisme ».

Il demande aussi à la Syrie de coopérer pleinement avec l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) dont une mission se trouve en Syrie pour réunir des éléments sur cette attaque chimique présumée qui aurait fait des dizaines de morts.

Dans le domaine de l’aide humanitaire, le texte réclame un « cessez-le-feu durable » et « exige un accès humanitaire sans restriction » partout en Syrie. En matière politique enfin, le projet « exige des autorités syriennes qu’elles s’engagent dans des négociations inter-syriennes de bonne foi, de manière constructive et sans préconditions » en application des dernières discussions menées à Genève le 3 mars.

Aucune date pour une mise au vote de ce texte n’est avancée, car la France veut se donner le temps d’une « vraie négociation », selon une source diplomatique. C’est la première fois qu’un texte regroupant les aspects chimique, humanitaire et politique du conflit vieux de plus de sept ans est proposé au Conseil de sécurité.

Moscou échoue à faire condamner les frappes

Le Conseil de sécurité de l’ONU s’est réuni en urgence, samedi, à la demande de la Russie, mais Moscou a échoué à faire condamner les frappes occidentales en Syrie lors du vote d’un projet de résolution. Le texte russe entendait « condamner l’agression commise contre la République arabe syrienne par les Etats-Unis et leurs alliés en violation du droit international et de la Charte des Nations unies ».

Pour être adopté, il aurait dû recueillir neuf voix en sa faveur et il aurait fallu qu’aucun membre permanent du Conseil de sécurité n’y oppose son veto. Seules la Russie, la Chine et la Bolivie ont voté en faveur du texte. Huit pays, dont les trois puissances occidentales engagées dans les frappes, s’y sont opposés et quatre autres se sont abstenus.

« Pourquoi n’avez-vous pas attendu le résultat de l’enquête que vous avez réclamée ? », a lancé à l’issue du vote l’ambassadeur russe auprès des Nations unies, Vassili Nebenzia, en allusion à la mission des inspecteurs de l’OIAC. Les Etats-Unis, la France et la Grande-Bretagne, a-t-il accusé, ont « démontré un mépris flagrant pour le droit international ».

« L’action de la France s’inscrit en pleine conformité avec les objectifs et les valeurs de la Charte des Nations unies », a répliqué son homologue français, François Delattre, rappelant que « la France n’a strictement aucun doute sur la responsabilité du régime d’Assad dans cette attaque » commise le 7 avril dernier à Douma, dans la Ghouta orientale.

Les Etats-Unis « prêts à dégainer de nouveau »

Dénonçant « l’usage systématique de son droit de veto au Conseil de sécurité », il a accusé la Russie d’avoir « trahi l’engagement qu’elle avait pris en 2013 devant ce Conseil de garantir la destruction de l’arsenal chimique syrien ». A l’été 2013, à la suite d’une précédente attaque chimique imputée au régime syrien dans la Ghouta orientale, et alors que Paris, Londres et Washington envisageaient déjà de riposter – avant d’y renoncer –, Moscou avait négocié avec les Etats-Unis un accord pour que les stocks d’armes chimiques de la Syrie soient détruits ou placés sous contrôle international.

« Au moment où il a ordonné l’attaque chimique du 7 avril, le régime syrien savait parfaitement à quoi il s’exposait. Il a, une nouvelle fois, voulu tester le seuil de tolérance de la communauté internationale, et il l’a rencontré », a poursuivi l’ambassadeur de France.

« J’ai parlé au président [Trump] ce matin, il a dit que si le régime syrien continue d’utiliser ce gaz toxique, les Etats-Unis sont prêts à dégainer de nouveau », a pour sa part menacé l’ambassadrice des Etats-Unis Nikki Haley devant le Conseil de sécurité. Elle a réaffirmé que les Etats-Unis étaient dans leur droit pour mener des attaques aériennes en Syrie.

En début de réunion, le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, avait appelé les membres du Conseil de sécurité à « agir en accord avec la Charte des Nations unies et dans le cadre du droit international » lorsqu’il est question de « paix et sécurité ».

 

 

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