Clôture de la session parlementaire d’automne : le compte à rebours est lancé, le bilan s’annonce maigre

A l’occasion de l’ouverture de la session d’automne du Parlement, le Monarque a prononcé le 11 octobre un discours dans lequel il a fait savoir que « cette année législative doit être marquée du sceau de la responsabilité et du sérieux ».

A 98 jours de l’ouverture de la première session de la 4ème année législative de la 10ème législature, le pré-bilan de cette session d’automne s’annonce maigre aussi bien sur le plan quantitatif que qualitatif. Ainsi, l’accélération de la cadence est, à l’heure qu’il est, un must afin d’examiner et adopter plusieurs textes législatifs qui continuent de stationner au Parlement.

A l’approche de la fin de la session d’automne du Parlement, on remarque que peu de textes importants et qui ont été très attendus ont pu franchir le cap de cette institution législative. Et ce, notamment à cause des tensions suscitées par certaines dispositions qui divisent les groupes parlementaires. La majorité et l’opposition ont continué à se livrer à un bras de fer serré en se lançant les accusations quant au report des discussions sur l’examen et l’adoption de plusieurs textes.

Selon Rachid Lazrak, expert en droit constitutionnel et spécialiste des affaires parlementaires et partisanes, cette session d’automne intervient dans un contexte particulier qui a été marqué par une restructuration de l’architecture gouvernementale, mais aussi par l’importance des textes qui ont été très attendus pour examen et adoption.

Pour le moment, les parlementaires ont adopté le Projet de la Loi de Finances 2020 qui a été publié au Bulletin officiel daté du 14 décembre 2019. Quant à la réforme du Code pénal, elle est toujours bloquée au niveau de la Chambre des représentants. Ce texte, déposé au Parlement en 2016, n’a pas encore été approuvé. Toutefois, les groupes parlementaires ont déposé leurs amendements. Aujourd’hui, c’est au tour de la Commission de la justice et de la législation de la Chambre des députés de programmer une séance pour discuter et voter le texte. En outre, c’est le silence radio du côté des parlementaires quant à la loi organique sur le droit de grève, le mécanisme de l’exception d’inconstitutionnalité, le régime des retraites des parlementaires et le projet de loi relatif à la couverture médicale des parents.

Il semble ainsi que rien n’a changé au cours de cette législature concernant la lenteur en matière d’examen des initiatives législatives parlementaires. Toutefois, pour Rachid Lazrak, ce n’est pas le nombre des lois adoptées par cette institution qui déterminent son efficacité et son efficience. « Il faut adopter des lois qui encadrent la mise en œuvre des projets et des décisions politiques et qui reflètent surtout les dynamiques de la société marocaines. Elles doivent également répondre aux attentes et aux préoccupations des citoyens. Toutefois, l’effectivité des lois et des réformes adoptée par le Parlement demeure aujourd’hui un problème majeur », a-t-il expliqué.

Par ailleurs, le spécialiste des affaires parlementaires pointe du doigt le manque des textes d’application des lois promulguées. D’après lui, l’adoption des lois et des réformes n’est pas automatiquement accompagnée ou suivie, dans des délais raisonnables par des dispositions opérationnelles. De plus, ficeler un texte de loi est un exercice périlleux qui nécessite des compétences rédactionnelles aiguisées, associées à une maîtrise pointue de la terminologie juridique. « À cela s’ajoute la nécessité de maîtriser l’impact des textes à la fois sur le budget de l’État que sur l’arsenal juridique dans son ensemble. L’expérience démontre que plusieurs propositions de loi ont été rejetées en raison de leur incompatibilité avec d’autres textes », a-t-il ajouté.

En outre, l’évaluation de l’opportunité de la loi permet d’améliorer de manière considérable l’impact de la loi et de prévenir contre d’éventuels chevauchements avec d’autres lois qui rendront de ce fait son application impossible. Elle suppose ainsi une connaissance précise de l’ensemble de l’arsenal juridique national et des conventions internationales pour déceler les incompatibilités éventuelles de se révéler après adoption de la loi. La réussite de cette mission nécessite donc de disposer de juristes spécialisés et d’experts dans les questions juridiques qui accompagneront le travail des commissions dans l’examen des projets et propositions de lois et apporteront l’expertise législative nécessaire pour réussir cet exercice. Or, la Chambre des représentants reste actuellement peu dotée en profils d’experts capables d’assurer cette mission, comme le note le Conseil économique, social et environnemental dans son rapport intitulé « L’approche parlementaire du nouveau modèle de développement du Royaume ».

A l’heure qu’il est, la session parlementaire d’automne tire à sa fin. Pourtant, sur le plan législatif, le bilan est encore maigre. Plusieurs textes n’ont pas été adoptés à cause des tensions entre les élus sur plusieurs points ainsi que manque d’expertise. De plus, cette année législative n’a pas été abordée dans la perspective de l’étape nouvelle du modèle de développement, dont les contours ont été esquissés par le Monarque. Elle a également été marquée par le manque d’opérationnalisation des réformes, du suivi des décisions, et de la réalisation des projets qui peuvent contribuer au processus de développement tous azimuts que connaît le pays.

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