En Algérie, le scandale de faux comptes de désinformation liés au régime

Les acteurs derrière ce genre de campagne utilisent souvent des thèmes liés à l’actualité, qui passionnent l’opinion publique, comme la pandémie ou les mouvements de contestation populaire pour attirer rapidement le plus possible de personnes.

Les autorités en Algérie ont fermé ces derniers mois plusieurs sites d’information, confirmant le verrouillage du paysage médiatique indépendant, en ligne notamment, et l’offensive contre la liberté de la presse et d’expression. Ces supportes ont été remplacés par d’autres noms, tels La Gazette d’Algérie, ou encore All About Algeria, inféodés au régime.

«La particularité de ces deux “médias” ? Aucune trace d’un seul journaliste y travaillant n’a pu être identifiée. Derrière cette façade trompeuse, se cache une obscure agence de marketing algérienne appelée Ayam Agency, qui alimente en contenu les deux marques. Ces comptes imitent le fonctionnement d’organismes de presse légitimes afin de diffuser des messages à caractère politique» note le journal français.

«Ces deux titres font partie des nombreux comptes supprimés par Facebook en juin. Le géant américain a ainsi annoncé la suppression de 130 profils, 221 pages, 35 groupes et 29 comptes Instagram. Ils relayaient des annonces sur les affaires courantes du pays en adoptant systématiquement le point de vue du gouvernement algérien et en dénigrant ses opposants» a-t-on noté.

Internet fait l’objet d’un bâillonnement croissant en Algérie, touchant à la fois les activités des médias en ligne et des internautes critiques à l’égard du pouvoir, et mobilisant tout un arsenal juridique afin de le domestiquer. Ainsi, une réforme du code pénal adoptée en avril 2020 visant à criminaliser la diffusion de fausses nouvelles a été dénoncée comme une sérieuse menace à la liberté d’expression et de presse par plusieurs organisations de défense des droits humains.

«La société américaine Graphika, spécialisée dans les nouvelles technologies et l’analyse des réseaux sociaux, a étudié les techniques d’influence et de désinformation sur internet utilisées en Algérie avant, pendant et après les manifestations du Hirak en 2019. Son rapport publié le 22 juillet met en lumière les procédés de manipulation de l’opinion à l’ère de la cyberguerre. L’enquête révèle une activité multiplateforme sur plusieurs années pour défendre les intérêts du président algérien, Abdelmadjid Tebboune, depuis sa candidature en 2019» révèle-t-on.

En octobre 2020, le régime algérien a adopté un projet de décret destiné à mieux «encadrer les activités des médias en ligne» mais ce n’est une réalité qu’une censure masquée. Il y est notamment prévu que les sites électroniques soient «exclusivement» hébergés en Algérie. «Toutes les ressources (matérielles, logicielles, humaines, création, exploitation) nécessaires à l’hébergement d’un site devront être également en Algérie», d’après l’agence officielle APS.

L’activité détaillée dans ce rapport montre comment les acteurs politiquement motivés sont «capables d’utiliser un comportement trompeur sur plusieurs plates-formes en ligne, pas seulement à des fins d’influence
“promotionnelle” pour les forces alignées sur le gouvernement. Mais ces
acteurs peuvent aussi attaquer et réduire au silence les voix discordantes»
, résume l’équipe de Graphika.

«Deux aspects illustrent la cyberguerre politique en Algérie. Le premier est celui des campagnes de harcèlement parrainées par l’État. Un phénomène que le rapport nomme “trolling patriotique”. Enregistrées dans le monde entier, elles ont ciblé des journalistes, des militants des droits de l’homme et des dissidents» détaille Le Figaro.

«Le rapport s’alarme de la promotion d’un soi-disant groupe d’hacktivistes qui a émergé en février. The Algerian Spy a publié des vidéos sur Facebook et YouTube qui prétendaient prouver la compromission des personnalités de l’opposition. Ces vidéos incluent des captures d’écran et des enregistrements de messages et de conversations soi-disant privés, ainsi que des informations financières, des documents d’identité et autres données personnelles», rapporte le quotidien français. Pour Graphika, ce deuxième aspect «illustre la manière dont les efforts de collecte de renseignements peuvent ensuite être militarisés pour intimider et discréditer les victimes».

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