Le gazoduc Nigeria–Maroc érige une artère énergétique transafricaine et incarne l’alliance stratégique entre Abuja et Rabat, rapporte Forbes dans sa nouvelle édition

L’édition d’octobre/novembre 2025 de Forbes Africa, consacrée au Nigeria, insiste sur le rôle déterminant du Maroc dans les ambitions énergétiques et diplomatiques d’Abuja. Le magazine met en avant le projet de gazoduc Nigeria–Maroc, décrit comme une œuvre à la fois industrielle et politique, et souligne que ce corridor gazier reliera l’Afrique de l’Ouest à l’Europe en traversant une quinzaine de pays.

Dès l’ouverture, la publication rappelle que le Nigeria «a longtemps reposé sur un trésor de gaz naturel, avec plus de 200 000 milliards de pieds cubes en réserves, ce qui en fait le premier détenteur africain et l’un des tout premiers mondiaux». Ces ressources, poursuit-elle, «sont demeurées sous-employées, éclipsées par le brut et freinées par des lacunes d’infrastructures et une inertie bureaucratique». Le pays s’attache désormais à substituer le gaz au diesel et à le transformer en épine dorsale de son économie.

Le président Bola Ahmed Adekunle Tinubu résume cette orientation en affirmant que «le Nigeria travaillera avec plus d’ardeur et sera productif avec son propre gaz. C’est une nécessité économique que nous devons embrasser».

Le Nigeria et le Maroc unis dans une architecture gazière continentale

Au centre du dossier figure le gazoduc Nigeria–Maroc, qualifié par Forbes Africa de «projet de 25 milliards de dollars, parmi les plus longs gazoducs offshore jamais planifiés». Long de près de 7 000 kilomètres, il doit relier le delta du Niger à la côte atlantique marocaine en traversant treize pays ouest-africains. La revue observe que «ce chantier n’est pas seulement un projet énergétique mais aussi une œuvre diplomatique, destinée à unifier les réseaux de la région et à relier l’Afrique à l’Europe».

Le ministre nigérian des affaires étrangères, Yusuf Tuggar, précise que ce gazoduc, désormais baptisé «African Atlantic Gas Pipeline» sous l’égide de la Cedeao, «acheminera le gaz du Nigeria à travers une quinzaine de pays jusqu’au Maroc, avant de rejoindre l’Europe par l’axe maghrébin». La même source ajoute que des producteurs comme le Sénégal ou le Ghana pourraient s’y raccorder, ce qui transformerait l’ouvrage en artère commune pour l’ensemble de la sous-région. Cette dimension multilatérale, souligne la revue, «scelle un partenariat stratégique avec Rabat, qui occupe une position géographique de porte d’entrée vers l’Europe et qui confère au projet une légitimité diplomatique».

Diplomatie économique et rapprochement politique avec Rabat

Le rapport évoque également l’élargissement de la coopération entre Abuja et Rabat au-delà de l’énergie. Forbes Africa rappelle que «le Maroc a appuyé le Nigeria dans la production d’engrais, permettant l’émergence de dizaines d’entreprises locales dans ce secteur vital». La revue mentionne la visite du roi Mohammed VI à Abuja en 2016, qui avait imprimé un élan nouveau aux relations bilatérales et ouvert un dialogue sur des sujets politiques sensibles.

M. Tinubu, relève encore la publication, a salué «les réalisations économiques et le développement du Maroc, invitant à approfondir le partenariat bilatéral». Dans cette perspective, Abuja met en place des accords pour protéger les investissements, développer les échanges commerciaux et instaurer de nouvelles liaisons aériennes.

Les entreprises publiques nigérianes s’intéressent également à l’industrie pétrochimique et aux fibres synthétiques du Maroc, tandis que le royaume, stable et relié à l’Union européenne, attire l’attention des investisseurs nigérians dans les domaines agroalimentaires, financiers et technologiques. Le ministre Tuggar insiste, enfin, sur la doctrine diplomatique de son pays, rappelant que «le Nigeria, héritier du non-alignement, demeure attaché à son autonomie stratégique tout en honorant ses engagements internationaux». Dans cette logique, Rabat figure désormais parmi les partenaires de confiance du Nigeria.

Une alliance appelée à transformer l’Afrique de l’Ouest

À terme, Forbes Africa estime que «le gazoduc Nigeria–Maroc contribuera à remodeler le paysage énergétique de l’Afrique de l’Ouest, en offrant au Nigeria un débouché inédit et au Maroc un rôle de hub continental». La revue note que ce couloir collectif «fournira du carburant à bas prix aux industries régionales et permettra à l’Europe d’accéder au gaz africain par une route sûre».

La stratégie nigériane, telle qu’exposée par M. Tinubu et son ministre des affaires étrangères, associe étroitement industrialisation nationale et intégration régionale. En se liant au Maroc, Abuja affirme sa volonté d’ériger une coopération Sud–Sud d’envergure, capable de rivaliser avec les puissances extérieures.

Pour la publication, «le Maroc apparaît comme un allié de premier plan dans l’échiquier énergétique nigérian, et le gazoduc Nigeria–Maroc constitue le fer de lance d’une stratégie qui conjugue autonomie intérieure et rayonnement continental».

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