Le Maroc apparaît dans les itinéraires de navires turcs qui contournent les restrictions commerciales avec Israël

Le média indépendant Bianet révèle, mardi 9 septembre en exclusivité, que des compagnies maritimes turques poursuivent leurs échanges avec Israël malgré les sanctions imposées par Ankara depuis octobre 2023. Le Maroc figure parmi les ports mentionnés dans ces itinéraires, aux côtés du Royaume-Uni, de la France, de la Belgique ou encore de Chypre.

Des cargaisons dissimulées par des pavillons étrangers

La Turquie a adopté depuis octobre 2023 une série de mesures punitives contre Israël, en invoquant «les massacres de civils et des politiques de nettoyage ethnique». De nouvelles règles introduites en juin 2024 imposaient aux navires fréquentant ses ports de déclarer qu’ils ne transportaient pas de matériel militaire à destination d’Israël et qu’ils n’étaient pas liés à des intérêts israéliens. Les bâtiments battant pavillon turc furent interdits de commerce avec Israël, tandis que les navires israéliens furent bannis des ports turcs.

Pourtant, constate Bianet, certains armateurs contournent ces contraintes en recourant à des pavillons étrangers. Le cargo Medkon Çanakkale, propriété d’une société stambouliote, navigue désormais sous immatriculation panaméenne. Après un départ d’Ambarlı le 2 septembre, il fit escale en Israël le 6 septembre, avant de gagner Aliağa, près d’Izmir. Le bâtiment avait auparavant mouillé à Nemrut, Gemlik, Diliskelesi, mais aussi à Ashdod. Son tirant d’eau de 8,2 mètres, relevé par MarineTraffic, «est inhabituellement élevé pour un navire vide, ce qui laisse supposer un chargement effectif».

Autre illustration : le Trans Carrier, navire roulier sous pavillon libérien, quitta İskenderun le 7 septembre en déclarant pour destination le canal de Suez. Mais le 8 septembre, il accostait au port israélien de Haïfa.

Un commerce qui «trouve toujours un passage»

Des spécialistes cités par Bianet soulignent que ces cas ne suffisent pas à attester d’échanges directs entre la Turquie et Israël. Ils admettent toutefois que «le commerce entre les deux pays se poursuit et demeure difficile à enrayer.»

L’un d’eux précise : «Les navires commerciaux ne transportent pas de marchandises pour un seul port. Ils chargent au Royaume-Uni, en France, en Belgique ou au Maroc, puis livrent en Grèce, en Turquie, à Chypre, au Liban et en Israël.» Le même expert développe son propos en affirmant : «Un départ de Turquie peut être annoncé pour le Liban, l’Égypte ou la Jordanie, avant qu’un changement de route n’intervienne, ou qu’un transfert terrestre n’achemine la cargaison vers Israël. Il n’existe aucun obstacle réel à cela. Le commerce est semblable à l’eau : il s’écoule et trouve toujours un passage.»

Malgré l’annonce en mai 2024 d’un arrêt total du commerce turc avec Israël, de nombreux indices attestent de contournements. Les statistiques de l’Assemblée des exportateurs de Turquie indiquent qu’en juillet, les exportations turques vers la Palestine ont bondi de 1 200 % par rapport à l’année précédente. Les ventes d’acier y ont crû de 51 000 % et celles de ciment de 453 000 %.

Ces chiffres surprennent, note Bianet, «compte tenu de l’infrastructure très limitée en Palestine pour absorber de tels volumes.»

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