Le gouvernement marocain conserve une ligne budgétaire de prudence pour l’exercice 2026 malgré les troubles sociaux survenus en septembre, observe Fitch Ratings. L’agence de notation estime que «le projet de loi de finances ne traduit pas une volonté d’accroître brutalement les dépenses publiques en réponse aux manifestations», ce qui, selon elle, «réduit l’un des risques budgétaires précédemment identifiés» lors de la confirmation de la note du Royaume à BB+, assortie d’une perspective stable.
Les protestations de septembre, les plus importantes depuis celles de 2011-2012, «ne constituent pas une menace majeure pour la stabilité politique», souligne Fitch, qui rappelle que «le Maroc a connu, au cours de la dernière décennie, des tensions sociales récurrentes liées à un chômage élevé, notamment parmi la jeunesse urbaine, tout en préservant la stabilité de ses institutions».
Prévisions budgétaires et équilibre des comptes
Le projet de loi de finances, déposé au Parlement le 20 octobre, prévoit une réduction du déficit budgétaire central à 3 % du produit intérieur brut (PIB) en 2026, contre 3,6 % inscrits dans la loi de finances 2025. Les dépenses globales devraient reculer à 26,8 % du PIB, contre 27,6 % l’année précédente, en raison d’une stricte maîtrise des charges courantes et d’investissements publics maintenus à un niveau stable.
Fitch précise que la contraction de 0,6 point de PIB des dépenses courantes proviendrait pour moitié de la modération de la masse salariale et pour moitié de la baisse des charges d’intérêts, des estimations jugées «crédibles» par l’agence.
Les recettes, quant à elles, connaîtraient un léger repli à 23,8 % du PIB, contre 24 % dans la loi de finances précédente. Le gouvernement anticipe une hausse des recettes fiscales, en particulier «une augmentation de 0,8 point de PIB de l’impôt sur les sociétés, portée par des mesures de mobilisation des ressources». Cette évolution serait toutefois compensée par une diminution des recettes non fiscales, liée à la réduction du recours aux dispositifs de «financement innovant».
Ces mécanismes, souvent fondés sur la cession ou la location d’actifs publics, ont permis de pallier des insuffisances ponctuelles de recettes. Fitch souligne néanmoins que «ces financements sont de nature ponctuelle» et qu’une orientation vers des sources de revenus plus pérennes «renforcerait la solidité de l’assainissement budgétaire».
Cohérence des prévisions et risques d’exécution
L’agence relève que «les orientations du budget 2026 sont étroitement alignées sur les projections antérieures des autorités». Une prévision triennale publiée fin 2024 tablait déjà sur un déficit de 3 % du PIB pour 2026, ce qui témoigne, selon Fitch, du fait que «les événements de septembre n’ont pas entraîné de révision significative de la trajectoire budgétaire».
Le déficit prévu reste conforme à la projection de Fitch, qui table sur «un déficit moyen de 3,1 % du PIB sur la période 2026-2027». Cette stabilité, selon l’agence, «devrait permettre à la dette publique centrale de poursuivre sa décrue, pour atteindre environ 66 % du PIB en 2026, contre 67 % en 2025», tout en demeurant supérieure à la médiane des États classés dans la catégorie BB (52 % en 2027).
Fitch identifie toutefois un risque potentiel lié aux «dépassements de coûts des investissements d’infrastructure», le Maroc s’apprêtant à engager d’importants chantiers en vue de la Coupe du monde de football 2030. Ces projets — aéroports, voies ferrées, installations sportives, hydrauliques et énergétiques — représentent environ 18 % du PIB, mais devraient, selon l’agence, «être en grande partie financés par des partenariats public-privé».
L’agence avertit néanmoins que «l’octroi de garanties aux entreprises publiques ou une prise en charge accrue de ces dépenses par le budget de l’État pourraient altérer la trajectoire d’assainissement prévue dans son scénario de référence».
